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“La vente directe doit encore travailler son image”

Patrick Duchen, directeur du département Dynamique des marchés au Crédoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie) a participé à l’Appui technique prospectif pour le secteur de la vente directe réalisé conjointement avec le  cabinet de conseil et d’études Geste. Il nous livre ses analyses.

 

Quel est le poids de la vente directe aujourd’hui ?

 

Le poids économique, c’est au moins quatre milliards d’euros. Et cela concerne à peu près 500 000 vendeurs. Il faut toutefois être très prudent avec ce dernier chiffre : il ne s’agit pas d’équivalents temps plein, beaucoup de personnes sont à temps partiel. Voilà pour la photographie prise en 2011.

En ce qui concerne son développement, le secteur a connu un fort dynamisme. Le nombre de vendeurs a été multiplié par 4 depuis quinze ans et le nombre d’entreprises a été multiplié par 2,3 depuis dix-sept ans. De plus, indicateur le plus important pour les économistes, la valeur ajoutée, le “PIB” du secteur a progressé de 5,6 % par an entre 2000 et 2009, alors que le commerce de détail dans son ensemble a augmenté de 3,3 %. C’est presque deux fois plus vite. Tout cela, indépendamment de la conjoncture économique.

 

Pour quelles raisons ?

 

Il y en a plusieurs. Il y a des raisons structurelles liées aux nouveaux besoins des consommateurs. La vente directe répond notamment à la demande de lien social, de convivialité, d’appartenance à une communauté. Cela correspond à des changements que l’on sent émerger depuis 10-15 ans. Cela répond également à d’autres choses autour de la recherche du bonheur, qui englobe aussi la valorisation des expériences positives. Certains rejettent la contrainte et adoptent des stratégies d’évitement par rapport aux courses. En vente directe, c’est confortable. On vient chez vous, dans votre environnement. Cela correspond aussi au besoin qu’a le consommateur de retrouver la confiance, à travers une relation de proximité, durable.

Et puis il y a des raisons conjoncturelles. En période de crise, ce type de métier ouvert à tous – il n’y a pas forcément besoin d’avoir un Bac + 2 ou Bac + 5, les profils peuvent être très différents en matière d’âge, de parcours – permet à des gens aux revenus modestes d’avoir un revenu complémentaire.

 

Quels sont les défis du secteur ?

 

En France, le secteur est moins développé que dans d’autres pays d’Europe et a fortiori qu’aux États-Unis. Il y a beaucoup de raisons à cela. La vente directe doit encore travailler son image, notamment pour attirer les jeunes, en tant que clients et en tant que vendeurs. Elle a une image un peu ringarde.

La deuxième chose, c’est de savoir retenir les vendeurs et leur faire comprendre que c’est un vrai métier, avec un savoir-faire, des techniques. Le métier de vendeur est assez ingrat, il faut s’acharner et il s’apprend.

Les entreprises doivent également miser sur les nouvelles technologies. Elles sont inquiètes par rapport au e-commerce. Mais s’il répond en partie sur le gain de temps et sur le prix, il ne correspond pas aux mêmes besoins. La vente directe doit donc s’appuyer sur les nouvelles technologies, sur les réseaux sociaux pour prospecter, pérenniser la clientèle, etc.

 

La tendance positive va-t-elle se poursuivre ?

 

Dans la mesure où cela répond à de nouvelles demandes de la société, si les entreprises de vente directe s’appuient sur les nouvelles technologies plutôt que de s’en isoler, si elles travaillent sur leur image et savent attirer puis retenir les vendeurs, il n’y a pas de raison que le rythme ralentisse. Si on se place du point de vue des vendeurs, dans une décennie qui s’annonce difficile, la multi-activité va également se développer. Il y a un ensemble de facteurs favorables.

 

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